Présentation de cette maladie virale, les symptômes, le cas particulier de la Mésange charbonnière
La variole aviaire ou poxvirose est une infection causée par des virus de la famille des Poxviridae et du genre Avipoxvirus. Elle peut toucher un grand nombre d’espèces d’oiseaux sauvages ou domestiques, allant de l’Autruche d’Afrique aux passereaux. Il existe deux formes, la variole « sèche » et la variole « humide », qui provoquent des symptômes différents. La première est la plus visible et la plus courante : elle se traduit par l’apparition de nodules cutanés ou pustules sur les zones faiblement emplumées, surtout sur la tête (autour des yeux et du bec notamment) mais aussi sur les pattes ou sur les ailes.
La Mésange charbonnière (Parus major) est parfois touchée par une forme particulière et atypique de poxvirose se traduisant par des nodules cutanés verruqueux particulièrement volumineux. Cette variante a été observée pour la première fois en Norvège dans les années 1970, et d’autres cas ont ensuite été signalés dans les années 2000 en Europe centrale et au Royaume-Uni, mais aussi en France (dans l’estuaire de la Gironde, dans la Sarthe et en région parisienne notamment).
La variole aviaire ou poxvirose
La variole aviaire ou poxvirose est une maladie causée par des virus à ADN double brin du genre Avipoxvirus. Elle est connue chez de nombreuses espèces d’oiseaux domestiques et sauvages : 278 espèces appartenant à 70 familles ont en effet été recensées jusqu’à présent. Elle peut poser des problèmes dans les élevages, notamment de poulets, de dindes et de cailles, mais aussi de canaris, de pigeons et même d’Autruches d’Afrique (Struthio camelus).
La variole concerne aussi une grande variété d’oiseaux sauvages : rapaces diurnes et nocturnes, albatros, goélands, grues, cygnes, perroquets, passereaux (Merle noir, Corneille noire, Pinson des arbres, Verdier d’Europe, Chardonneret élégant, Accenteur mouchet, Moineau domestique, Étourneau sansonnet, etc.). Elle aurait été responsable du déclin de plusieurs oiseaux endémiques dans l’archipel d’Hawaï. Elle a été introduite dans l’archipel des Galápagos (Équateur) à la fin des années 1980, où elle a touché de façon variable différentes espèces de pinsons (genre Geospiza) endémiques.
Les symptômes
On distingue deux principales formes de variole aviaire :
- la forme « sèche », plus facile à repérer, se traduit par des lésions ressemblant à des verrues vésiculeuses puis nodulaires, essentiellement sur les parties déplumées de la tête (crête, barbillons, base du bec, contour des yeux), mais aussi sur les pattes ou les ailes. La période d’incubation et la durée de l’infection à virus de la variole aviaire sont variables (de quelques jours à plusieurs mois), mais les oiseaux aux lésions bénignes peuvent récupérer, et il s’agit sûrement de la situation la plus courante dans la nature. Ces nodules cependant peuvent compromettre la vision, la capacité à se nourrir, ou entraîner une infection bactérienne ou fongique secondaire et rendre les individus plus vulnérables à la prédation.
- La forme diphtérique ou « humide », qui se transmet par inhalation du virus, provoque l’apparition d’une membrane « diphtérique » au niveau de la bouche, du pharynx, du larynx et parfois de la trachée, provoquant des difficultés pour manger ou boire. Elle a été rarement signalée chez les oiseaux sauvages, sans doute parce qu’elle est moins aisée à diagnostiquer sur le terrain. Le risque de mortalité (généralement par asphyxie) est plus élevé (proche de 50 %) que pour la forme sèche.
D’autres symptômes sont parfois visibles : affaiblissement, amaigrissement, conjonctivite. La susceptibilité à l’infection varie selon les espèces, l’âge (les juvéniles sont plus fragiles), l’état immunitaire, la saison et l’environnement local.
Les virus du genre Avipoxvirus
Les avipoxvirus sont des virus à ADN (et non pas à ARN comme les virus de la grippe aviaire). Il existe plusieurs espèces d’avipoxvirus, comme Avipoxvirus serini (variole des canaris), Avipoxvirus columbae (variole des pigeons), Avipoxvirus galli (variole des poulets), Avipoxvirus meleagridis (variole des dindons), Avipoxvirus falconis (variole des faucons), Avipoxvirus fringillae (variole des juncos et d’autres fringilles), Avipoxvirus acridotheridis (variole des Martins tristes), Avipoxvirus coturnicis (variole des cailles), Avipoxvirus passeri (variole des moineaux), Avipoxvirus sturni (varioles des étourneaux), Avipoxvirus psittaci (variole des perroquets), …
Ils sont de forme ovale ou d’haltère et mesurent de 200 à 400 nanomètres de long : ils sont donc relativement « grands » (environ trois fois la taille d’un virus moyen) et peuvent être visualisés avec un bon microscope optique.
Leur surface extérieure, composée de lipides et de protéines, est biconcave et striée. L’intérieur est composé de deux corps latéraux, dont la fonction est inconnue, et d’un coeur formé de nucléoprotéines compressées et variées (plus de 100).
Leur génome est formé d’un double brin d’ADN de 130 à 300 kilopaires de bases.
Les avipoxvirus existent sous deux formes :
- le Virus Extracellulaire Enveloppé (EEV en anglais) à l’extérieur de la cellule hôte, comprend deux membranes externes
- le Virus Mature Intracellulaire (IMV en anglais) intracellulaire.
Le cas particulier de la variole aviaire chez la Mésange charbonnière
Chez la Mésange charbonnière (Parus major), la poxvirose peut présenter, en fonction de la compétence des défenses immunitaires de l’hôte, une forme particulière, atypique, se traduisant par des nodules cutanés verruqueux particulièrement volumineux. Ces nodules sont situés principalement sur la tête, autour des yeux ou du bec, mais ils peuvent également être présents sur les pattes ou les ailes. Ils sont de couleur grisâtre, rouge et/ou jaune et peuvent s’ulcérer et saigner suite à des frottements. La vitesse de développement de ces nodules est variable d’un individu à l’autre, et un nodule peut voir sa taille multipliée par cinq en un mois.
Les oiseaux atteints se déplacent et se nourrissent dans un premier temps normalement. Lorsque les lésions sont trop volumineuses et/ou mal placées, elles peuvent handicaper l’oiseau dans ses déplacements ou sa prise de nourriture, et limiter son champ visuel, le rendant plus vulnérable aux attaques de prédateurs.
Certains oiseaux guérissent de leurs lésions, même volumineuses (environ 20 %), mais la majorité des individus malades décèdent probablement suite à des surinfections ou à cause de la prédation.
Outre une répercussion sur l’état général de la Mésange charbonnière, il a été récemment démontré que cette maladie pouvait avoir un impact négatif sur la croissance d’une population en réduisant le succès reproducteur des parents : en effet, la poxvirose est coûteuse en énergie pour les parents malades, qui s’épuisent à alimenter les jeunes jusqu’à leur indépendance. Par ailleurs, les parents peuvent transmettre le virus aux oisillons particulièrement sensibles et entraîner leur mort. Enfin, la poxvirose, en affaiblissant les oiseaux, fragilise les populations de Mésanges charbonnières en les rendant plus sensibles aux autres facteurs environnementaux (bactéries, froid, etc.).
Quand peut-on observer des Mésanges charbonnières atteintes de cette maladie ?
Les dernières études réalisées récemment sur le sujet au Royaume-Uni font état d’une saisonnalité dans l’observation des cas de poxvirose chez la Mésange charbonnière : il semble, en effet, que le taux d’animaux malades soit plus élevé en automne et au début de l’hiver. Cette saisonnalité s’expliquerait par des facteurs environnementaux et démographiques : augmentation de la population de vecteurs et notamment des moustiques à la fin de l’été et afflux et/ou massif dans l’environnement de jeunes oiseaux de l’année possédant un système immunitaire « naïf » (sensible à l’infection).
Les cas de poxvirose chez la Mésange charbonnière sont, par ailleurs observés plus tardivement dans l’année en Scandinavie et en Europe centrale qu’au Royaume-Uni. Dans ce dernier pays, des cas sont fréquemment rapportés en fin d’été; cette particularité anglaise s’expliquerait par des pratiques différentes de nourrissage par l’Homme (les jardins anglais disposent souvent de postes de nourrissage approvisionnés toutes les saisons), permettant ainsi l’observation d’individus malades à cette période.